enfant se fait gronder avec autorité


Les enfants n’ont pas besoin d’autorité !
« Mais non, les enfants ont besoin d’autorité ! » Combien de fois j’ai entendu cette phrase dans les formations que j’anime ! Je réponds invariablement NON, subir une autorité n’est pas un besoin, c’est un choix de société. Si on veut vivre dans un monde respectueux de l’humanité, habituer les enfants à se plier à une autorité n’est pas du tout la bonne méthode. 

En fait, je comprends qu’on puisse penser que les enfants doivent apprendre à respecter l’autorité. On dit « respecter », mais cela veut dire se soumettre. Il faut obéir à son père, son chef, son patron, son mari, à la loi, à la règle, aux usages, à la tradition, aux rituels, aux habitudes, aux coutumes … se soumettre, se soumettre, se soumettre ! Et donc les enfants doivent s’y habituer.

Cependant, tout ça n’est valable que si l’on pense que le rapport dominant dominé doit être le fondement de notre société. Si on trouve normal et souhaitable qu’une petite partie de la population domine les autres. 

Mais, il existe un autre chemin. Une voie dans laquelle le partage remplace la domination. Et les enfants sont naturellement doués pour ça. Le respect pour les autres est naturel, la soumission ne l’est pas, on doit l’apprendre, par la force.

« Voulez-vous apprendre aux jeunes à respecter l’autorité,
ou à craindre ce que vous pouvez leur faire
si vous êtes en position d’autorité ? »

Marshall Rosenberg

La domination, 10 000 ans d’histoire

Walter WINK, théologien et historien, indique que depuis 10 000 ans, toutes les civilisations ont mis en place une « organisation de domination » visant à contrôler nos sociétés. Et c’est le cas de la civilisation actuelle qui est caractérisée par une distribution inégale des richesses, des privilèges et du pouvoir. Une minorité de gens domine le reste de la population mondiale. L’usage de la violence est « légitime » pour maintenir l’ordre.

Les gouvernements, les entreprises, les organisations religieuses et même les familles fonctionnent selon un mode hiérarchique dans lequel ceux qui sont en haut ont plus de droits que ceux d’en bas. 

Ceux d’en haut veulent conserver leurs acquis et ceux d’en bas rêvent d’être en haut.

L’être humain est mauvais par nature ?

Dans ces systèmes, l’être humain est considéré comme mauvais par nature : égoïste, violent, malhonnête, menteur, etc. Et donc, il faut le soumettre à une autorité qui saura le guider sur le bon chemin. Les guides devront être les plus sages ou plutôt les moins mauvais. Mais dans la réalité, une fois la hiérarchie mise en place, c’est le plus fort qui prend la place du chef impose sa vision aux autres. 

La domination en famille

Dans les familles, c’est pareil, l’enfant est tout en bas de la hiérarchie et les parents tout en haut. Le papa juste au-dessus de la maman, bien sûr, c’est lui le chef de famille 😀. Même entre les enfants, il s’installe une hiérarchie corrélée à l’âge. En l’absence des parents, le plus grand a autorité sur les suivants. Privilège de l’âge ou droit d’ainesse. 

Malheureusement, dans un tel modèle de société, les enfants n’ont d’autres choix que de se soumettre. En attendant le moment où ils pourront soumettre à leur tour d’autre plus faibles. Et on insiste bien sur le fait que les enfants doivent se soumettre et s’y habituer. À la maison, on leur dit qu’il faudra obéir à la maitresse d’école. A l’école, on leur dit qu’il faut s’y habituer car, après, il faudra obéir à son patron, à la police, au gouvernement, aux lois. 

La domination n’est pas une fatalité

Pour Walter WINK, prendre conscience de ce mode de fonctionnement est une première étape vers le changement. Les « organisations de domination » peuvent être remplacées par des « organisations de partage ». Et elles ont déjà existé, avant ces 10000 dernières années.

Les organisations basées sur le partage : pas besoin d’autorité

Riane Eisler, spécialiste des systèmes sociaux, historienne de la culture et avocate, explique, a écrit un ouvrage : Le Calice et l’Épée. Elle y explique que la brutalité et la violence qui semblent caractériser nos sociétés ne constituent pas un modèle unique dans l’histoire de l’humanité. Pour énoncer cela, elle s’est appuyé sur des travaux de divers scientifiques, tels que des archéologues, des anthropologues, des physiciens, des chimistes, etc. 

Selon Riane Eisler, les premières sociétés humaines étaient basées sur des valeurs « féminines » de partage, d’entraide et de paix et qu’ensuite les valeurs masculines de force, de violence et de domination ont pris le dessus.

Ainsi, les cultures préhistoriques européennes du paléolithique et plus tard du néolithique (7000 av. J-C à 3500 av J-C) connaissaient une société dont la structure était totalement différente des sociétés récentes. La civilisation était basée sur la coopération et le don, symbolisés par la figure de la Déesse et où les qualités comme le service aux autres, la compassion, et la non-violence étaient extrêmement importants. Cette société préhistorique formait un modèle de société basé sur le « partenariat » qui s’opposait au modèle « dominateur », basé sur la hiérarchie (hieros, « sacré », et –archie, « pouvoir »).

C’est donc possible !

Autorité ou autorité ?

Pour sortir de la relation dominant dominé qui nuit aux bonnes relations entre les parents et les enfants, il me semble important de faire la distinction entre « être l’autorité » et « faire autorité ».

Dans le premier cas, l’autorité est légitimée par le pouvoir d’infliger une punition. C’est l’autorité à laquelle il faut se soumettre sous peine de sanction. Elle crée des enfants « soumis mais futurs rebelles ».

La deuxième forme d’autorité est légitimée par la compétence. On est une autorité quand on est capable d’apporter de la valeur aux gens. A cette autorité, on adhère librement, par choix. 

Les enfants ont besoin de cette autorité-là. Des personnes qui leur apportent de la valeur. Des parents qui sont capables de satisfaire les besoins de l’enfant, des enseignants passionnants qui répondent aux questions que l’enfant se pose, des modèles inspirants qui leur permettent de se projeter dans l’avenir.

Ils n’ont pas besoin d’une autorité qui contraint, violente, puni ou soumet. Quand on soumet quelqu’un, on en fait un ennemi. A 4 ans, 6 ans, 8 ans, bien sûr que l’enfant obéit sous la contrainte. Mais il emmagasine de la rancœur et il attend le jour où il se sentira assez fort pour se révolter. En général, c’est à l’adolescence. Et là, ça pète !

Malheureusement, à ce moment-là, le réflexe des adultes, c’est de rajouter plus d’autorité alors que c’était ça le problème de départ.

Utiliser l’autorité contrainte avec les enfants est la meilleure façon de se créer une relation conflictuelle à l’adolescence.

Pour grandir et se projeter dans l’avenir, les enfants ont besoin d’adultes représentant un avenir possible pour eux. Des adultes que l’enfant aurait envie de devenir. Des modèles. L’enfant n’a pas envie de devenir un adulte qui lui fait du mal. Il ne suivra pas un modèle défaillant.

Comment représenter une autorité aux yeux de ses enfants ?

« Il est paradoxal mais vrai que les parents perdent
leur influence en utilisant leur pouvoir
« 

Thomas Gordon

Pour représenter une autorité aux yeux de ses enfants, il faut les aider à satisfaire leurs besoins. Voir l’article sur les besoins puis sur celui sur les besoins des enfants.

Comme on l’a dit, faire autorité, c’est apporter de la valeur aux gens. Et quelqu’un donne de la valeur s’il aide à satisfaire des besoins, s’il aide à résoudre un problème. Or, les trois besoins les plus importants dans l’enfance sont :

  • la sécurité ;
  • l’amour ;
  • grandir

Pour plus d’information sur le sujet, consultez l’article sur les besoins en cliquant ici.

Sécuriser

Le premier besoin d’un enfant, c’est la sécurité. Cela commence par faire ce qu’il faut pour que l’enfant ait ses besoins physiologiques satisfaits : il a à manger, à boire, un toit, du linge … En effet, l’enfant ne doit pas s’inquiéter de savoir s’il aura à manger ou pas.

Ensuite, l’enfant doit être protégé des agressions. Le parent doit donc veiller à ce que personne ne lui fasse du mal : à la maison, à l’école ou la garderie. Le parent respecté sera celui qui protège.

La maison ou, au moins, la chambre de l’enfant, doit être un sanctuaire dans lequel l’enfant peut se réfugier, il n’y risque rien. La pire des choses, c’est quand le danger est à l’intérieur de la maison. Si les parents représentent un danger par leur capacité à punir, à blesser (physiquement ou moralement) ou à gronder, l’enfant est en difficulté. Les personnes qu’il aime le plus, les seules sur qui il devrait pouvoir compter, sont la cause de la souffrance. C’est un vrai handicap dans la construction de son estime de soi.

Lisez l’article sur la peur.

Donner de l’amour

Le deuxième besoin, c’est l’amour. L’enfant doit se sentir connecté avec ses parents. Il doit recevoir des retours positifs : câlins, caresses, regards, paroles douces … L’amour qu’on a pour ses enfants doit être montré. L’enfant a besoin des démonstrations d’amour. Même venant des papas ! 😄

J’ai vu tellement de papas très autoritaire qui se cachent derrière « il le sait que je l’aime » mais ils ne l’ont jamais dit ou montré. L’enfant souffre de ce manque de manifestation d’amour.

Aider à grandir

Les enfants ont besoin d’apprendre. Et là aussi, quoiqu’en pensent certains enseignants, pas besoin d’autorité. La meilleure façon d’apprendre, c’est le jeu. Oui, le cours magistral comme à l’école ça décourage tout le monde. Et, c’est clair que si les cours ne sont pas adaptés aux processus d’apprentissage, on a besoin d’autorité pour « faire passer la pilule ».

L’enfant doit jouer ! Alors, jouez avec lui et laissez-lui des temps de jeu tout seul. Vous êtes juste présent (pour les besoins de sécurité et de connexion).

Grandir, c’est aussi expérimenter. On n’apprend que de ses propres expériences. Il faut donc que les parents ne cherchent pas à contrôler, mais à rendre autonome. Pour cela, il faut laisser l’enfant faire des choix et se rendre compte par lui-même de ses erreurs.

Conclusion

Pour être un bon parent, nul besoin d’autorité. Ce qu’il faut c’est accompagner nos enfants pour qu’ils apprennent à satisfaire leurs besoins en autonomie. À la naissance, les parents prennent complètement en charge l’enfant et vont s’occuper de ses besoins : nourriture, sommeil, propreté … Mais progressivement, il faut passer le relai à l’enfant. Dès qu’il demande à faire quelque chose tout seul, il faut le laisser faire. On peut l’aider, mais il doit faire le maximum en autonomie. Le bon parent est présent mais pas directif ou contrôlant.

Ce qui va aider l’enfant, c’est de lui apporter de l’amour, de la sécurité et de le laisser grandir dans la joie et le jeu. Le besoin d’autorité est un mythe qui avait son utilité au siècle dernier, car on devait former des ouvriers obéissants. Ce n’est plus le cas. Pour en savoir plus sur ce que les enfants d’aujourd’hui doivent apprendre, pensez à télécharger mon guide « Les 10 compétences essentielles pour réussir« 

Au bonheur des enfants

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5 réponses pour “Les enfants n’ont pas besoin d’autorité !”

  • C’est vrai que l’autorité peut avoir des effets néfastes sur les enfants. Je suis mariée à un Iranien et j’ai trois enfants. Mon mari et moi, n’avons jamais pas fait preuve de beaucoup d’autorité. D’une part, je n’en ai pas naturellement et d’autre part, mon mari, n’en a pas culturellement. En effet, en Iran les enfants sont traités comme des rois et ils ne les punissent que très rarement. Mais comme je dis souvent, je n’ai jamais eu besoin de les punir car mes enfants ne m’ont jamais de mémoire fait de grosses bêtises 😀

  • Superbe article ! Très bien documenté, il ouvre vraiment sur une réflexion intéressante. Je suis convaincu que les parents peuvent se faire respecter tel que tu le décris à la fin de ton article. Personnellement j’ai grandi dans une famille aimante et je n’ai jamais ressenti la peur vis à vis de mes parents. Tout se passait très bien. Merci ton article devrait être lu et partagé au plus grand nombre.

  • Whaou, alors vraiment merci pour cet article qui rejoins tout à fait ma vision du monde et notamment par rapport à l’autorité sur les enfants. C’est parfois difficile de trouver de nouvelles pistes car, toute notre société nous pousse à ce type d’éducation. Marshall Rosenberg, notamment, avec la communication non violente, m’a beaucoup aidé à comprendre comment nous en sommes arrivés là et quelles sont les pistes pour éduquer autrement. Merci encore et excellente suite à ton blog 👍

  • Réflexion très intéressante. Malheureusement, tous les enfants ne sont pas réceptif de la même façon. J’essaie d’utiliser l’autorité en dernier recours et de leur faire comprendre le pourquoi et l’importance des choix. Ca fonctionne très bien avec ma fille, beaucoup moins avec mon fils qui teste les limites tout le temps (ça fait plus de 11 ans que ça dure ;-)). Je garde espoir !
    Belle journée

  • Merci pour ce très bel article. Je pense aussi que l’être humain naît fondamentalement bon. Je suis institutrice maternelle et je me suis occupée d’enfants de nombreuses cultures différentes. J’ai remarqué qu’un seul langage nous rassemble et nous aide a vivre en harmonie: celui de l’amour, du respect et de la confiance! Je te souhaite une bonne continuation pour ton blog!

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